"Nous précédons les besoins du marché de l'imagerie"
Vidéo Le père des normes MPEG explique les enjeux de cette industrie
Qui ne s'est jamais énervé devant un écran parce qu'il n'arrivait pas à lire une vidéo? Depuis vingt ans, le groupe MPEG (Moving Picture Experts Group), rattaché à l'Organisation internationale de normalisation (ISO) àGenève, s'attelle à éviter l'anarchie dans les technologies. A l'occasion d’une grande conférence d'experts réunis cette semaine à l'EPFL à Lausanne, rencontre avec le “père” des normes MPEG, l'italien Leonardo Chiariglione.
Le Temps: Est-ce vous qui faites les normes ou est-ce l'industrie qui vous les impose?
Leonardo Chiariglione: Notre ambition est de proposer des solutions qui soient exploitables par l'industrie, les constructeurs d'appareils, mais aussi par les utilisateurs. Car l'incompatibilité des systèmes entraine une grande frustration des consommateurs. Parfois néanmoins, certaines sociétés, comme Apple avec son iPod, réussissent à imposer leur standard. Nous, nous proposons un format ouvert, de référence et accessible à tous.
- Vous ne pouvez donc pas rendre vos modèles contraignants?
- Mais nous ne le voulons pas! Les consommateurs doivent avoir une liberté de choix. il parait évident qu'au final, celui qui écoute de la musique a envie de pouvoir le faire sur n'importe quel appareil.
- MPEG 1, 4, A, B, C, D,etc. Comment s’y retrouver dans cette jungle?
- Chaque numéro et maintenant les lettres de l'alphabet correspondent à des réalités bien précises. La norme D vise par exemple la création d'un son multicanal audio (surround) à partir dune base mono ou stéréo.
- Est-ce quevous précédez le marché, ou le suivez-vous?
- Nous avons pris une attitude d'innovation, ce qui n'est pas courant dans le monde de la normalisation. Nous voulons identifier tôt les besoins latents pour proposer une technologie quand le marché est pret à l'exploiter. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de compétition.
- Alors, pouvez-vous nous décrire l'imagerie de demain?
- Nous essayons d'anticiper. Par exemple, aujourd'hui, quand vous regardez le journal à la télévision, vous voyez une image “plate” (2D). Nous travaillons sur la transmission de l'information visuelle spatiale. Peut-etre qu'à terme, vous aurez un joystick dans les mains et vous pourrez “bouger” vous-même l'angle de la caméra. Ou peut-etre que les applications seront très différentes. Ce qui nous intéresse, c'est vraiment la transmission des signaux et d'ailleurs, nous collaborons étroitement avec l'Union intemationale des communica-ions à Genève. Nous avons aussi un groupe qui travail en aparté pourcréer la norme sur la vidéo scalable. Cette dernière permet de créer une fois pour toutes le contenu, puis d'en extraire l'information dont on a besoin en fonction du canal de diffusion.
Propos recueillls par Marie-Laure Chapatte
L'EPFL mise sur l'archivage
Un des enjeux futurs de cette industrie multimédia réside dans le stockage et l'archivage des données sur une longue durée. L'EPFL relève ce défi: permettre de sauvegarder dans le temps, et de manière fidèle, ces données, et de les exploiter de la façon la plus riche possible.
«Notre projet démarre avec les concerts du Montreux Jazz Festival. Le but sera de produire une archive des données audiovisuelles numériques de très haute qualité. Ce sera une première mondiale», explique Touradj Ebrahimi, professeur en traitement des signaux multimédias. Une rencontre dans ce sens a été organisée mercredi. “Nous travaillerons main dans la main avec l'Orga- nisation internationale de normalisation, poursuit le spécialiste.» L'EPFL compIe laisser sa signature dans la nouvelle norme d'archivage.
M.-L C.